Caché sous la table en noyer de la salle à manger, le petit Michel Tremblay observe, écoute. L’appartement de la rue Favre à Montréal est un cœur qui bat fort, où tout excepté l’ennui peut arriver. Vivre ensemble à dix dans sept pièces n’est forcément pas de tout repos. Le quotidien s’égrène au rythme des rires et des soucis, des conversations interminables et des chicanes qui surviennent pour tout, pour rien. Et si l’argent manque toujours un peu, l’amour, lui, déborde.
Des années après son remarquable et émouvant Un ange cornu avec des ailes de tôle (et Les vues animées, son pendant), l’auteur repart sur les chemins de son enfance au fil de huit récits d’apprentissage qui se dégustent d’une traite. Comme toujours, Michel Tremblay se révèle extrêmement habile à faire de son écriture un magistral instrument de séduction. C’est drôle, tendre, sensible et intelligent. Le sel de ces récits tient en somme à leur sucre. Mais soyez tranquillisés : avec ces bonbons-ci, ne vous guette qu’une hyperglycémie de plaisir sans gravité aucune.
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Bonbons assortis
Michel Tremblay
Actes Sud – Col. Babel
153 pages
jacqueline dit
Je n’ai rien lu de lui mais vous m’avez donnée l’envie de le lire, bon, en mm temps l’éditeur est déjà une belle promesse. Au revoir.
Philippe dit
Jacqueline, donner envie était le but, bonne découverte donc !
Vinciane dit
Alors, je vais m’en régaler davantage, merci Philippe.
Bon dimanche
Vinciane
Philippe dit
Vinciane, bon appétit !
Jean françois Téoulé dit
” du côté de chez Philippe” on trouve toujours des choses extraordianaires ! Livres, photos, atmoshères bien à lui …. et tous ces liens vers des blogs quim’inspirent tant et que je transmets aux gens que j’aime . merci… merci ….
Philippe dit
Jean-François, je suis ravi de pouvoir procurer un peu de plaisir là où j’en trouve moi-même, et que ce fil conducteur se poursuive sur d’autres blogs.
Jean-Louis dit
Merci. A propos de Montréal et de nos chers Québécois, je vous recommande, à vous et à vos lecteurs, le film de Xavier Dolan : “Les amours imaginaires”.
Philippe dit
Jean-Louis, une amie vivant à Montréal et de passage à Paris m’en a aussi récemment parlé, en bien…
anne dit
Philippe
Je tremble à l’idée de ne pas réussir à faire court…
Michel Tremblay, dans tous ses récits autobiographiques, est typiquement le genre d’écrivain que j’adopte, littéralement.
Je m’installe confortablement. A côté de moi, dans un vieux fauteuil club en cuir usagé, l’ami se raconte. Je suis sa confidente et gare à qui oserait troubler ce moment.
C’est précisément ce qui est arrivé, il y a des années, tandis que je dévorais “Un ange cornu avec des ailes de tôles”.
Alertée par mes éclats de rires, ma fille de 14 ans vient aux nouvelles. Je lâche des bribes, elle adore le titre. Et se met à attendre son tour.
Le temps passe. Bien que l’ayant parcouru deux fois d’une traite, je refuse de le lâcher. Je fais durer le plaisir, m’y replonge souvent tête la première, ne serait-ce que pour quelques minutes.
Je deviens une “traitresse”. “Je la mets à la torture. J’avais promis. Elle VOULAIT ce livre, je l’avais assez lu et relu !”
Si je cédais, la connaissant, je n’étais pas prête de le revoir.
Elle eut le sien, et un rituel s’installa entre nous. Dès que j’étais seule, elle se faufilait dans mon lit, et nous nous plongions chacune dans notre exemplaire, ouvert au hasard. Au premier éclat de rire de l’une, l’autre demandait “tu en es où ?”, changeait de page et nous continuions de concert, au même tempo.
Aujourd’hui encore, la seule mention du titre est une private joke qui nous met en transe.
J’aimerai dire quelques mots de trois autres titres.
“La nuit des princes charmants”, “Le coeur découvert” et “Le coeur éclaté”.
Michel Tremblay enfouit sa pudeur dans sa poche.
Son adolescence, et l’évidence d’une différence qu’il ne sait par quel bout prendre et quoi en faire, mais tout est bien qui finit bien…
L’age adulte, la découverte du grand amour, beau comme un ange, père d’un petit garçon. Il faut se replacer dans le contexte des années 80, quand vivre en couple homosexuel, et créer une relation affective avec le fils de son ami, était un véritable défit social, à mille lieux de l’idée d’homoparentalité…
Le dernier opus, nous plonge dans la tourmente des années SIDA, entremêle désarroi personnel et souffrance collective. Si la tristesse est omni présente, la vie reste la plus forte. Elle continue, le rire entre les larmes, au fil des superbes couchers de soleil sur Key West.
J’espère que vous ne me tiendrez pas rigueur de m’être imposée ainsi. C’est un auteur qui fait partie de la famille, et ces trois romans font écho aux années les plus importantes et les plus fortes de ma vie professionnelle.
Ses “Bonbons assortis”, je les ai déjà dégusté.
Je n’ai aucun de ses livres ici. Une horrible sensation de manque m’envahit.
Vais-je téléphoner à ma fille, l’envoyer chercher son “Ange Cornu” et lui demander de me faire la lecture ?
Parions que nous y serions encore ce soir, et qu’il y aurait plus de rires que de mots !
Merci Philippe d’avoir ravivé ces souvenirs. Ils vont m’accompagner dans les bois, parmi les rafales de vent qui font frissonner et s’envoler les feuilles de ce début d’automne.
Et dès que je suis de retour chez moi, je relis tout Michel Tremblay.
Anne
Philippe dit
Anne, j’ai lu également les autres livres que vous citez, ainsi que Les vues animées. Je n’ai pour seul tort que de ne pas en avoir lu d’autres encore. Car M. Tremblay est pour le moins un auteur prolixe. Un ange cornu avec des ailes de tôles fait partie de ces livres qu’on ne peut pas oublier. C’est une de mes amies qui me l’avait offert quand j’étais étudiant. Elle avait été bien inspirée ! Je ferais bien d’ailleurs de le relire un de ces jours. Je suis content en tout cas que cette évocation bloguesque vous parle tant et ravive en vous d’heureux souvenirs…
nad dit
Merci pour ce partage d’une littérature hors des cris et soubresauts de la rentrée, des agitations et des accolades médiatiques… qui nous font oublier pourquoi écrire peut encore être un plaisir, lorsqu’on a coeur de partager un peu plus qu’un poème parfois.
Philippe dit
Nad, depuis le début Gris-bleu se moque des tendances, actus, modes, buzz et autres sorties comme de sa première tétine, ou à peu près.
cathy dit
merci Philippe!!..ce livre me fait envie…ce sera ma prochaine lecture!!!
bonne soirée et bonne semaine, Cathy
Philippe dit
Cathy, alors…bonne lecture ! Vous avez raison de céder à cette douce tentation.
fleur de sel dit
Je vais me plonger donc dans ces “bonbons assortis” bien que lors de mon bref séjour parisien les enfants et les bonbons j’ai donné plus que mon compte, “famille quand tu nous tiens!” ne pouvant refuser de rendre service, j’ai donc été vampirisée et corvéable à n’en plus finir.Adieu donc, vaches,cochons,couvées et adieu par la même occasion Monet! Mais ce n’est que partie remise,et lors d’un prochain séjour parisien je brandirai non pas le pot au lait mais le glaive de la liberté et crierai haut et fort : Monet passera par moi!” je vais donc me consoler avec une dose du dernier Tremblay et une piqûre de rappel de ses précédents livres.
Philippe dit
Valérie, n’avez-vous pas une nurse à prêter ? pensez-y une prochaine fois. Une nurse avec un fouet. Cela permet d’interdire l’accès au bonbons et de les garder pour soi, gniark, gniark !!
Pas de Monet pour moi non plus encore finalement, ma nurse n’a pas voulu me laisser sortir ! ;-)
kinekelly dit
Un vrai délice cette critique!
Philippe dit
Kinekelly, c’est le mot en effet !
Il est 17 heures dit
J’étais repassé pour revoir ma petite voiture jaune..et je repars finalement avec un bon conseil litteraire.
C’est bien.
Philippe dit
Birgit, le conseil de lecture pollue moins ! ;-)
poesiemarine dit
merci philippe vous avez suscité l’envie de lire ce livre à bientot françoise
Philippe dit
Poésie marine, tant mieux ! Vous ne devriez pas être déçue.