Rien ne m’est plus étranger que de pouvoir envisager le repos dans un tumulte quelconque. Juin ou septembre sont de bons alliés à mes retranchements. Pas de ressourcement sans moments ou périodes de solitude. Être pleinement avec les autres, dans le meilleur sens du terme, et être seul, pleinement aussi. Ma famille, mes amis, connaissent et respectent ce besoin. C’est toujours avec beaucoup de gentillesse que je les entends m’inciter à partir loin, le plus loin possible, et à rentrer tard, le plus tard possible. Si je montre quelque scrupule à les délaisser, ils insistent avec vigueur. Cela leur fait, disent-ils, des vacances. Comme c’est délicat de leur part de ne pas vouloir me faire sentir combien je vais leur manquer !
Je finis donc toujours par répondre favorablement à leurs compréhensives incitations. Ils saluent ensuite mon départ avec maints “Allez, oust !” ou “Bon vent !” qui semblent les rendre joyeux et comme soulagés.
Il n’est pas donné à tout le monde d’aimer la solitude. Beaucoup de gens se trouvent bien seuls, peu se trouvent bien, seuls. Une différence pas seulement imputable à une virgule. Car il convient avant tout d’apprécier d’être en sa propre compagnie, ce qui est heureusement mon cas. Je suis à moi-même l’ami bienveillant qui me permet de remettre, de-ci, de-là, ma vie en perspective, et d’octroyer à la douce contemplation des choses le temps qui lui est nécessaire, loin des vaines agitations qui parasitent incessamment notre quotidien.
Mais n’y a t-il pas du danger à prendre ainsi du recul à doses régulières ? vous demandez-vous.
En effet, cette disposition d’esprit comporte sûrement un danger quelconque. Mais vous dire lequel, je ne sais pas.
Le recul a l’avantage en revanche de vous faire accéder à un champ de conscience élargi. Bien que ce soit sans doute ce dernier qui permette d’avoir du recul. La question n’a pas encore été tranchée.
Parfois, lorsque vous prenez vraiment beaucoup de recul, cela vous fait ressembler à un petit point sur l’horizon. A éviter.
Le plus souvent cela vous fait vous sentir seul quand vous ne l’êtes pas. Dans la foule, la contemplation admirative des autres vous laisse largement perplexe : ils ont tout l’air d’avoir l’intelligence d’un panier de poireaux, alors que vous, vous avez beau vous entraîner tous les matins dans la salle de bain, vous n’arrivez qu’à des résultats très insatisfaisants en la matière.
Oreillettisée, iphonisée, la majorité d’entre eux part il est vrai avec un incontestable avantage sur moi.
Handicapé par ma lourde tendance au recul, je peine donc péniblement à devenir un abruti plus accompli. Je ne souhaite cela à personne, surtout par les temps qui courent, si vite, dans cette direction.
Voilà ce qui guette à vouloir adopter une présomptueuse disposition au recul, à la réflexion, à l’arrêt. Qu’il faudrait être idiot pour dire que celle-ci comporte sûrement un danger quelconque, sans être fichu de dire lequel !
Cette disposition peut d’ailleurs entraîner plus loin encore. Mes pérégrinations basques m’ont ainsi indiqué plus clairement que jamais à quel point je devenais inapte au déplaisir. Je me sens devenir en matière de désagrément un incompétent absolu. Je laisse mes désirs voguer jusqu’aux verts pâturages de leur satisfaction, sans plus les dévier dans les censurantes voies du refoulement.
Mais où tout cela va-t-il donc me mener ?
A être moi, de plus en plus. De mieux en mieux.
Je ne me lasse pas de votre prose. Point de photos cependant chez moi à l’heure où je vous écris, je serai obligée de revenir.
A tantôt donc.
F la fermière
Pour moi non plus pas de photo, seules les paroles… auriez vous pris trop de recul ! Je reviendrai plus tard pour relire et (re)garder.
Ca y est les photos sont apparues, belles – le texte est toujours là, entre humour , dérision et profonde réflexion, j’aime …
Point de photos pour moi non plus !
Que je partage tes dires, Philippe. Je suis moi-même très souvent interpellée par ces réflexions. Je dois avouer que je suis en parfait accord avec toi quant au fait que ma présence suffit à mon être. Je vis seule une semaine sur deux, ce besoin incessant de me retrouver seule, cette solitude qui m’est nécessaire pour me sentir enfin moi. Cela fait maintenant 10 ans que je mène cette vie !!! Si je calcule bien, 5 ans à être seule avec moi-même !!! Quelle somptueuse renaissance et découverte de soi. Jamais je ne pourrai quitter ce lieu de bien-être.
Bonne soirée à toi qui me bouleverse à chaque fois que mes yeux se posent sur tes mots…
Vinciane
Il suffisait de le dire… enfin, elles apparaissent toujours plus belles les unes que les autres… Merci
Vinciane
Pas de jolies photos, mes des mots qui courent, s’élancent en gerbes magnifiques… et se posent, délicats commes les feuilles à la surface de l’eau. Chaque mot fait son chemin, doucement au creux de moi… Amitié. Frédérique
Merci pour votre blog toujours plein d’esprit et de beautés qui me touchent. Bel automne à vous!Vous avez raison, ces moments de solitudes sont essentiels et permettent pleinement d’être avec les autres ensuite. Béa
On est jamais seul de la même façon Philippe !
Bon week end à toi !
la solitude me met face à mes angoisses…..pouah!je déteste être seule….enfin si juste 2,3 heures le matin…c’est bien suffisant!
Bises
ps:j’aime la photos des transats…et puis la marinière te va à merveille
Mulette, une marinière en coton magique je crois. Voilà 15 ans que je lui en fais voir de toutes les couleurs, et rien ne l’atteint !
La solitude est agréable et bénéfique quand on en l’a décidée, elle est un exercice voulu et nécessaire. Elle devient odieuse quand elle est une obligation, une contrainte imposée par la vie. La décider permet d’en contrôler la durée, et de revenir à des plaisirs partagés quand on veut. La subir suppose qu’elle n’a pas de fin, et que la tristesse, puis la douleur, vont prendre le pas sur l’introspection. Elle est aussi comme une drogue, on devient addict, et on supporte de moins en moins de ne pas être seul… et on risque de finir seul.
Je me retrouve tellement dans ce texte, que je n’ai pas envie, cette fois, d’y répondre.
Peur de rentrer dans le domaine de l’intime.
C’est différent quand l’on tient la plume. Je me suis livrée beaucoup dans mes blogs, parce que l’on délimite à l’avance un territoire.
Mais vous direz-vous, pourquoi laisser un commentaire pour dire que l’on préfère n’en laisser point ?
Simplement, à cause de ce petit sourire que j’ai au coin des lèvres.
Il n’y a pas de mystère dans le sentiment d’affinité…
I simply love your blog. J’adore.
les photos sont belles, ne peut pas imaginer cet automne a commencé pour vous par cela reflète
La virgule change tout,effectivement !….
Quelle est cette crise métaphysique? est-ce le périple dans des contrées hostiles qui l’a provoquée? Le Philippe nouveau est-il arrivé? (en avance sur le Beaujolais)! Un peu de repli sur soi est bénéfique,je vous l’accorde,mais à force de vous replier sur vous même et de rentrer dans votre coquille,vous allez finir en vieil escargot ou en bigorneau de VOTRE côte charentaise, mais tout rabougri! Cependant,c’est bien le mélange complexe de votre personnalité qui est attachant et qui séduit les fans de Gris-bleu! mais ne vous mettez pas “au vert” trop longtemps!
Valérie, ohhh, on dit cagouille et non escargot !!
J’ai trouvé beaucoup de questionnements dans votre prose, les phrases sont belles mais pleine de mélancolie. Pourquoi avoir envie d’être seul ? est ce pour ne pas entendre les autres ? les autres sont ils si différents de vous ? les autres vous font-ils si peur ? A rester trop longtemps seul on finit par tourner en rond, et on ne trouve pas toujours les réponses à nos questions. Les autres ,s’ils sont bien choisis , peuvent vous aimer et vous rendre heureux . Vous êtes jeune, beau, ne vous enfermez pas sur vous même vous risquez d’être malheureux et je ne le voudrais pas.
Nadette, je ne parle pas de LA solitude mais de moments de solitude choisis (“à doses régulières”). J’évoque ma famille et mes amis par ailleurs. Voilà un texte d’humour au contraire extrêmement positif, qui fait aussi écho à la citation de Paul Morand dans ma colonne de gauche.
A si mal me lire, vous avez vu dans ce texte ce que vous aviez envie d’entendre. N’êtes-vous pas en cela en train de trahir, au contraire de ce que vous affirmez, le désir latent que je sois malheureux ?
Question de dosage !
Aimer la solitude sans la sublimer …
La jeunesse provoque parfois de ces mélancolies …
Marie-Ange
Virgule ou pas, ce que je vois sur la première photo en haut à gauche, vous barbotez… sans votre bouée !!!
La solitude, certes, mais l’imprudence face à la marée qui guette. Monsieur Gris-Bleu, quand même !
Beau dimanche à vous.
brigitte
Plumes d’anges, mais non, ce n’est pas moi en haut à gauche. Moi j’ai TOUJOURS ma bouée !
Moi aussi j’adore les belles solitudes, et chapeau bas, Philippe, je deviens addict à ce blog, et vous retrouve comme un ami qui partage son courage d’être lui-même….et où il y a partage, il n’y a plus de solitude, juste une belle différence, une belle présence, …
Pascale, je m’en voudrais si vous deveniez gris-bleuïnomane ! ;-)
Mon sentiment tout a fait personnel – et probalement assez absurde – en lisant ce texte, était que le besoin de reflexion t’empechait de demander la main de ta fiancée sur la plage de St. Jean de Luz….
Irationel, fondé sur rien, je sais, pardonne-moi ;-). Enfin, c’est moi….je me suis trouvée depuis un moment;-)
Birgit, je lui est annoncé que tu étais en quelque sorte ma fiancée virtuelle. Elle n’a pas supporté !
Un éloge de la solitude que j’approuve. Cela permet la contemplation ,l’introspection,le recul et la réflexion. Conjugué à l’ art de la lenteur et vous avez les clefs du bonheur.Enfin, le mien…Chacun sa voie.
Bonne semaine, monsieur Gris-bleu.
Faahei, si j’ai les clefs de votre bonheur, il faudra quand même que je pense à vous les rendre ! ;-)
Les mots pour le dire.
Vos mots volés de ma bouche pour le dire.
Ô Solitude
Mon enfant, ma sœur, songe à sa douceur.
Allo Tango Charly ? Sur ce coup-là je vous reçois Cinq sur Cinq
Bouboule, la liaison est bonne, ça ne grésille pas : on se reçoit même 20 sur 20 je dirais ! ;-)
“Gris-bleuïnomane”, c’est fait, je le suis déjà, mais sans aucun regret et comme je rêve de vivre aussi bien ma solitude existentielle…Quel exemple pour moi ! Merci, Philippe.
bonjour Gris-bleu , je ne trouve pas du tout votre prose mélancolique bien au contraire.Comme vous le dites si bien , le recule permet d’accéder un champ de conscience élargi et supérieur si bien que lorsque vous vous retrouver avec les” humains” tous vos sens sont exacerbés , vous devenez un véritable” récepteur ” au point de les deviner , voir les moindre détailles et percevoir les intrigues qui se trament ou les idylles en gestations. La solitude m’a toujours permis d’aiguiser mon sixième sens( infaillible!! ) et surtout me reconstruire lorsque la vie ( ou les amis) nous joue des tours. Je n’ai toujours pas rencontrer meilleure amie ou confidente que moi même pour moi même et ce n’ai pas faute d’avoir essayer et récidiver.Pour beaucoup cela paraîtra prétentieux , mais la solitude est un état de conscience à ne surtout pas mettre entre n’importe quelles mains au risque de venir une pathologie!! Sinon, je vous découvre exactement comme je vous avais deviné: un beau brun ténébreux !! et tellement romantique ( je parle des photos ! of course!!)
Soraya, merci, vous rendez justice à mon texte ! ;-)
Comment pourrais-je ne pas être d’accord , cette solitude là , je l’aime et je la trouve même constructive !
Un vrai bonheur .
Je viens de parcourir un peu ton blog. Je trouve tes photos RAVISSANTES !
Je te souhaite un excellent dimanche.
Amicalement.
Sauf erreur, je n’ai pas trouvé de réponses à mes questions sur les photos… Mais, ci-dessus, tout de même un brin : il y a quelquefois du monde, un ou une assistante. Si je pose des questions, c’est que j’aime l’ambiance, le vaporeux, le trouble, le brouillard… et me demande : comment fait-il ? Est-ce un flou de filtre, un flou provenant d’une manœuvre sur l’ordinateur ou tout simplement sur l’objectif lui-même ??? Allez savoir… Chacun ses secrets, n’est-ce pas ! JPG