Prestidigitatrice connue de son état, Zuleika Dobson possède une beauté et un charme irrésistibles, à telle enseigne que tous les hommes tombent irrémédiablement amoureux d’elle à sa vue. Sa visite à son grand-père, recteur de l’un des collèges d’Oxford, fera chavirer les cœurs et souffler un vent de déraison généralisée parmi les étudiants. D’autant que la belle Zuleika bouillonne elle aussi de céder aux abandons de l’amour, ce que son incapacité à aimer quand elle se sait aimée ne lui a pas permis jusqu’alors.
Lorsqu’elle rencontre le duc de Dorset le soir même de son arrivée, celui-ci paraissant ne rien remarquer de sa beauté ni être sensible à son charme, elle en tombe aussitôt amoureuse. Incarnation paroxystique du dandy, trop occupé à nourrir un sentiment d’amour tourné vers soi, le duc de Dorset a tout en effet pour séduire Zuleika : “[…] chez lui le sentiment dandiesque s’était jusque-là manifesté dans toute son ampleur, sans nuance aucune, et sans accident. Il était trop pénétré de sa propre perfection pour songer même à admirer quelque autre personne. À la différence de Zuleika, il ne voyait pas dans sa garde-robe et sa table de toilette les instruments propres à renforcer l’admiration d’autrui, mais les moyens d’intensifier le rituel fait pour exprimer et vivifier sa propre idolâtrie.”
La froideur narcissique du duc ne tardera pourtant pas céder du terrain à un sentiment d’amour insolite qu’il tentera de repousser en pure perte. C’en sera fait de lui comme des autres, éperdu d’amour à son tour, situation qui précipite Zuleika dans une indifférence dégoutée et le duc dans le projet fou de se donner la mort pour elle, haut et noble exemple que les autres étudiants voudront reprendre à leur compte.
Dans ce roman initialement paru en 1911, Max Beerbohm s’en est donné à cœur joie sur le thème amoureux du “fuis-moi je te suis, suis-moi je te fuis” en lui donnant une déclinaison imprégnée d’humour et d’extravagance. L’auteur s’arroge pour ce faire toutes les libertés, prenant la parole dans son récit, faisant apparaître ici ou là des fantômes, sondant les pensées des statues, ou remettant le destin de tel personnage (pour ne pas vous en dire plus) dans les mains des dieux, amusante métaphore de la toute puissance du romancier.
Nous devons cette “curieuse publication” comme il est dit en troisième de couverture à la sympathique maison d’édition Monsieur Toussaint Louverture qui consacre en partie son activité à faire renaître des pépites oubliées sous la forme d’objets très soignés, de fort belle qualité : papier souple et épais, effets de relief et de brillance, illustrations etc. Zuleika Dobson en est un magnifique exemple. Cela n’en rend que plus dommageable les nombreuses fautes (erreurs orthographiques, typographiques…) qui jonchent le texte. Lorsque vous lisez pour la énième fois “le Duc”, “le Recteur” et “évènement” pour ne citer que cela, ne pas se laisser gagner par un profond désespoir tient de l’héroïsme. Rendons justice à Max Beerbohm qui n’y est pour rien : son texte vaut d’être lu pour son originalité, sa finesse et sa très réjouissante fantaisie.
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Zuleika Dobson
Max Beerbohm
Éditions Monsieur Toussaint Louverture
2010
352 pages
Illustrations de George Him.
Malgré les itérations et autres fautes,ton résumé et ce que tu en dis,donne envie de le lire. Je me demande si je ne vais pas me laisser tenter!!!
bises et bon dimanche!
La littérature britannique t’inspire toujours de joyeuses lectures !
Zulieka Dobson………one of my favourite film scripts based on the book that never got made……it would have been delicious…………..those costumes the locations the set design……
“Nuage rose” est sévère puisque son texte contient au moins une faute d’orthographe et pour le moins quatre fautes de frappe… Cela dit, et comme lui, j’ai eu envie de lire cet ouvrage en prenant connaissance de votre commentaire très bien écrit. Le sujet correspond bien à votre tournure d’esprit ! Merci… Même si je ne lis pas ce roman, j’aurais éprouvé du plaisir à savourer votre analyse.
Hi hi hi … j’aurais aurait dû s’écrire “j’aurai”…
chez le même éditeur j’ ai beaucoup aimé ” La prière a Google ”
de D de Chaunac + Les touristes
ayant habité un des plus beaux villages Français ( 100 ) pendant
25 ans ; le touriste est assez remarquable dans sa diversité
maintenant je suis installée en plein champs !!!!!!!!!!
bonne semaine Mr Grisbleu
Edith
Votre résumé donne envie de lire ce livre et, j’avoue avoir une faiblesse particulière pour les Dandies !!
Merci Philippe de nous faire découvrir aussi brillamment cette œuvre méconnue, je vous promets de la parcourir si j’arrive à mettre la main dessus !
Ce cher Max, de son véritable nom Henri Maximilian Beerbohm était apprécié à son époque pour son humour, ses pastiches et ses caricatures piquantes, toujours courtoises.
J’avais lu et relu cette ” Oxford love story “: aaah!, Zuleika Dobson, comme il est bon et raffiné de souhaiter mourir pour toi, moi aussi ! …. telle une épidémie mortelle …
Qu’il est bon aussi, cher Philippe de glisser dans la petite poche supérieure de votre veste, un billet doux de mon carnet de bal, écrit de mes doigts tremblants: ceci est un cadeau, prenez la peine de vous glisser dans mon ” Regard de Femme ” ….
Je vous souhaite une très douce soirée,
Véronique
Merci de nous faire partager vos découvertes, moi qui aime la littérature anglaise, votre résumé me donne très envie de lire cet ouvrage !
Connaissez-vous Vita Sackville-West ? So british…
Oui, j’ai lu d’elle Toute passion abolie, et Plus jamais d’invités.