Je suis tombé nez à nez, samedi aux puces, avec une réédition de 1964 de Sous les cocardes, un album illustré de Marcel Jeanjean. Je l’ai pris en main, l’ai feuilleté, le coup de foudre a été immédiat.
Tout d’abord intégré à la cavalerie Marcel Jeanjean entre dans l’aviation en 1917. Il en naîtra Sous les cocardes, publié en 1919 chez Hachette. L’album retrace avec gaîté la vie de son escadrille. La guerre est là certes, mais en arrière-plan, sa tragédie largement effacée comme pour mieux, sans doute, s’en évader. Un parti pris tout de légèreté donc, de bonhomie et d’humour, qui ne pouvait que trouver sa place sur Gris-bleu, en sus de mes étagères.
Hélas, mes photos rendent piètrement justice à l’objet : des pages épaisses, des teintes incroyablement douces et harmonieuses, des textes remarquablement bien écrits, et bien sûr ces dessins bourrés de charme tels qu’on les prisait dans les années 20 et 30, à la fois “simples” et très expressifs. On pense aux premiers dessins d’Hergé, mais aussi à ceux d’André Pécoud ou de Jean de Brunhoff. L’un de mes arrière-grands-pères qui dessinait à la même période faisait preuve de cette dextérité typique et cela n’est vraisemblablement pas étranger au bonheur que j’ai eu à emporter l’album dans mon escarcelle. Les rencontres ne sont jamais hasardeuses. Je n’ai donc pas été très étonné de voir à quel point ce que je déplore bien souvent, je veux parler du dévoiement de notre humanité et de l’uniformisation des masses, Marcel Jeanjean le déplorait déjà en 19. À propos des insignes des avions, il écrit :
“Tels les emblèmes parlants aux écus des chevaliers, les insignes rutilent aux flancs des fuselages. D’or, d’argent, d’azur, de gueules, de sinople ou de sable, toute une héraldique ingénue est née de l’aviation héroïque et fantasque, creuset miraculeux où se fondent la ténacité du fantassin, la hardiesse du cavalier, la fermeté de l’artilleur. Une chevalerie nouvelle se lève, résurrection juvénile et ardente des fantômes corsetés de fer gisant au tréfonds de l’Histoire, refuge ultime de l’Humain dans un monde qui va se déshumanisant, refus allégorique du grégaire anonyme et du nivellement universel.”
Plein de justesse, de tendresse, de douceur dans les mots comme dans les photos !
Bonne semaine Philippe.
Vinciane
comme ces illustrations sont belles et les textes semblent plein d’humour…difficile de ne pas craquer!!!bonne soirée et …belle lecture!
Cathy
J’aime bien Milou qui galope a côté de la voiture chargée de « bonhommes » costumés en guerriers .illustration d’une guerre sale qui se trouve si romanesque ici ! Sur cette route aux arbres fleuris …. On croit rêver aux retours sains et saufs de ces joyeux guerriers partis festoyer avec un ennemi complaisant …
Belle trouvaille Philipe !
Très touchée par ton dégoût de l’uniformisation des masses… Très touchée par les dessins et la couleur; tellement de douceur et d’élégance (ah, les textes aussi, bien sûr!) si rares aujourd’hui dans la vie quotidienne. Et j’aime la ligne claire en illustration comme en B.D. Une jolie prise! Je n’ai pas eu une telle chance durant mon vide-grenier de Samedi! Mais je n’ai pas dit mon dernier mot…
Merci Philippe. C’est bizarre, j’ai lu ce livre il y a bien longtemps mais je ne sais plus du tout dans quelles circonstances… ça m’avait marquée et voilà que ce post a titillé ma mémoire.
Bonne semaine !
Une belle trouvaille,avec un texte toujours d’actualité,qui réveille des souvenirs d’enfance,un vrai petit trésor…
Quelle merveille !!!
Merci Philippe pour cette découverte… Merci surtout de me donner une idée épatante pour l’anniversaire prochain de mon amoureux, un “Gémeaux” fou d’aviation et de petits n’avions… !
Ca va-t-y pas faire un cadeau de rêve, ça ??!!
(le vôtre est-il une ré-édition de 2003, comme la plupart de ceux -rares- qu’on trouve sur le net, ou avez-vous déniché un exemplaire d’origine ? > ceux de 2003 semblent avoir une couverture pelliculée… beurk, quelle sale manie !!)
Encore un grand merci ravi !!!
Polly, avez-vous trouvé votre bonheur pour votre amoureux ? Vous avez fait un bon choix (je parle de votre amoureux), les Gémeaux sont ce qui se fait de mieux !
Pour ce qui est de la réponse à votre dernière question, elle est écrite dans la première ligne de mon texte et je ne saurais mieux la formuler ! ;-) Soit, le plaisir de me lire vous a fait vider une bouteille de Champagne ce qui fait que vous n’avez finalement lu qu’une ligne sur deux. Je ne vous jette pas la pierre, je fais cela moi-même tout le temps ! ;-)
Quelle chance d’avoir trouvé ce livre illustré !!
Une bien jolie trouvaille, tu es chanceux
Belle journée
je ne sais plus qui disait : “il n’y a pas de hasard , il n’y a que des rendez-vous.”
Magnifique trouvaille ! merci pour ce partage peu commun ! J’adhère complètement au commentaire de Jean-François…
Un réel bonheur et à te lire et à découvrir ce bel album qui réveille en moi quelques souvenirs d’un grand père il y a trop longtemps disparu…….
Que s’est-il passé ? plus d’adresse automatique, plus d’image intégrée ?? Faut-il refaire l’inscription de ma photo que j’avais eu du mal à mettre en œuvre ???
Dans mes souvenirs d’enfants Sanintongeais il me semble avoir rencontré sous forme de petit journal (Sous Les Cocardes) mélangé avec d’autres souvenirs de la grande guerre.
Cette illustration m’a frappé et je te remercie de si bien la mettre en valeur par tes écrits
Il y a des coups de foudre auxquels il ne faut pas résister !
Que du bonheur que de feuilleter ces pages , savourer ces illustrations et sourire devant les écrits …
Vol inspiré au-dessus du fracas…
J’adore ce genre d’album, les illustrations ont l’air d’être des originaux, tant la qualité de reproduction est bonne, et la qualité du papier épaisse, comme s’il s’agissait de papier d’Arches. La typographie aussi est sublime!
Laetitia
Voilà un très bel album à ajouter au nombre de vos trésors, cher Philippe!
Bons baisers,
Emilienne
L’abécédaire était en coton imprimé. Les lettres et les chiffres pâlissaient au fil des lessives. Ce furent ensuite le premier cahier, le plumier aux trésors, la plume sergent Major et l’encrier incrusté dans le bois patiné d’un bureau. Ce livre fait ressurgir le souvenir des leçons d’écriture, de dessin, de français…Il est émouvant, naïf et tout simplement beau. Quelle était belle la guerre de papa sous le doigts de Monsieur Jeanjean. Qui saura recréer la magie “dans un monde qui va se déshumanisant”.
Mes doigts ne le peuvent plus, poursuivez votre quête des trésors d’autrefois et pardonnez-moi d’avoir évoqué votre petit minou. Je ne savais pas…
Swann
Comme je comprends et partage ton sentiment à la lecture de ces anciennes pages aux couleurs fanées et aux dessins un peu désuets. C’est charmant, au sens 1er du terme.
Ta découverte n’est pas anodine, tu devais la faire!
Perso je collectionne les Comtesse de Ségur illustrés par Pécoud et j’ai eu l’immense joie de recevoir un jour en cadeau The histoire pour moi: les 4 filles du Docteur March illustrées par Pécoud. Tu comprends mieux pourquoi je te comprends n’est ce pas???
Oui, plus rien ne m’échappe et je comprends qu’on se comprend ! ;-)
De retour de Vendée… Il fallait bien voter ! Je reprends donc mon dernier envoi et constate avec plaisir que les automatismes concernant mon nom, mon image, mon adresse, sont revenus. Tant mieux, je vais pouvoir me joindre aux nombreux compliments qui vous ont été tressés à propos de votre découverte, de son illustration et de l’excellent texte que vous avez commis à cette occasion. Déshumanisation. Le grand mot. N’assiste-t-on pas à ce processus depuis qu’Adam et Ève ont été chassés du Paradis !? Mais vous-mêmes, par vos photos, vos créations, vos textes, ne participez-vous pas au tissage d’un lien entre nous, à l’embellissement de la vie de telle sorte que le signe de l’humanité vous accompagne et que nous le ressentons… Rien n’est perdu.
J’ajoute ma modeste et tardive contribution à ce très bel hommage rendu à l’artiste.
Comme Célestine, je connaissais un de ses contemporains, André Pécoud, via la Comtesse de Ségur (on est des filles…) mais j’admire tout autant le tracé à la fois fin et précis de Marcel Jeanjean sur un sujet plus grave.
Quant à la “petite phrase” sur le nivellement -par le bas- universel, elle prouve si besoin est que le sujet n’est pas nouveau.
Merci de nous faire partager ces jolis moments dans le cadre de notre bulle, virtuelle certes, mais pas si superficielle…
Très joli album aux dessins et teintes si délicates…mon grand-père paternel faisait partie des Vieilles Tiges de France, ou pionniers de l’aviation, j’ai quelques photos prises par lui lors de vols de reconnaissance ainsi que des photos de son groupe d’officiers spécialistes des photos aériennes, je ne sais pas comment incruster une photo dans un com sinon je l’aurais jointe à mon propos.
Cette déshumanisation n’est rien d’autre que la perte et l’abandon de vraies valeurs au profit d’autres qui sont fausses ou détournées pour ne pas dire déformées.
Bonne journée Philippe.
Les livres, toujours interessants. Et les anciens, surtout en bon état, merveilleux. J’en ai aussi, mais j’ai laisse certains sur le chemin, parce que la vie continue et trop de vieux nous peut nous noyer. Je veux choses charmants et spécials et llaisser de l’spai, aussi, pour le nouveau. Et vous, vous vous avez perdu entre ces pages? Vous nous avez oubliés?
Un objet précieux avec un sens du graphisme et de la couleur qui ne laisse pas indifférent…. Co
;o)))))) Cher Philippe, le seul fait que vous existiez me fait vider une bouteille de Champagne chaque jour !! Pas d’excuse donc au fait d’avoir zappé l’info de la première ligne mais je sais déjà que vous ne m’en tenez pas rigueur…
J’ai différé mon idée de cadeau (ça coûte un bras sur internet, cette petite merveille… J’espère que la vôtre, aux Puces, était une meilleure affaire !). Mais comme je n’imagine pas trouver la perle rare à un prix raisonnable, j’attendrai plus prosaÎquement que le petit cochon soit mieux garni (je parlais de ma tirelire, what else ? ;o)
Merci (comme toujours) pour votre douce et gentille sollicitude…
Je profite d’être ici pour déposer un baiser furtif sur votre front récemment ceint des lauriers du 22 mai; les plus beaux qui soient, murmure-t-on dans les alcôves des dieux…
Non je ne connaissais pas ces illustrations, trop jeune sûrement mais ça me fait penser à Hergé et son Tintin ;-) Merci en tout cas pour cette belle découverte !
En plus Marcel Jeanjean était charmant et modeste aussi attachant que cet album
Merci pour vos commentaires qui lui attirent de jeunes lecteurs