Je suis allé la semaine passée dîner à une table d’hôtes* dans le 19ème, un bric-à-brac chaleureux, du mobilier de brocante, trois ou quatre tables éclairées par de grosses lampes basses, un choix de bons vins et une cuisine sans apprêt, de quoi passer un moment agréable et un peu hors de temps. Depuis que j’ai goûté ce soir-là à du fromage de brebis servi avec de la confiture de cerises, je ne m’en passe plus.
A la maison, ma réserve à confitures recelait heureusement un pot aux cerises. Je peux même vous dire, sans beaucoup trahir mon intimité cuisinesque, que son petit couvercle ne demandait qu’à être ouvert par mes petits bras, et que son contenu n’avait qu’un désir dans la vie, celui de venir s’étaler sur les morceaux du brebis, ni trop fruité, ni pas assez, rapporté amoureusement du marché.
Il faut croire que les petites saveurs produisent de grands effets : moi qui ne m’intéresse que de loin au design, je me suis surpris à acheter le numéro d’IDEAT du mois de février, à le lire, et qui plus est à le trouver pas mal du tout. Ma confiture contenait-elle une autre substance que des cerises ?
Certes, au fond, je ne parviens pas tout à fait à rompre avec le sentiment que le design n’est le plus souvent qu’une caricature de lui-même, non pas froid dans la forme, tel que l’on pourrait sans doute un peu facilement le juger, mais froid dans le fond, aseptisé, lisse, abolissant un certain rapport à soi, celui de son histoire. Autant dire que le design et moi n’avons a priori pas grand chose à nous dire. Que peut-il me raconter d’ailleurs à part ce que ses créateurs essaient de lui faire dire à travers des intellectualisations stéréotypées, souvent infatuées ou absconses ? Le design semble condamné à une auto-justification incessante qui ressemble, de près, à ces chansons dont on rabâche le même couplet parce que l’on n’en connaît pas toutes les paroles, et dont on se lasse bien vite…
Mais tout cela était sans compter sur l’effet inattendu de la confiture et du fromage ! J’ai curieusement fait taire mon sentiment général, mis mes deux pieds dans le présent et me suis donc plongé dans IDEAT et son sommaire entièrement “made in France”. Ce numéro de février part en effet à la rencontre de tous ceux, connus ou moins connus, qui font vivre la création et l’innovation française. Entre les nombreux portraits et interviews, IDEAT nous parle du N°5 de Chanel, fait un point sur le prêt-à-porter ou nous invite chez Andrée Putman. C’est dense, complet, avec le parti pris de faire valoir, en ces temps économiquement moroses, le dynamisme français et son rayonnement à l’international.
La revue n’échappe pas bien sûr à la mise en avant d’une sélection d’objets et de pièces de mobilier, comme le font peu ou prou toutes les revues de décoration. De ce choix plutôt large, j’ai aimé d’emblée la lampe cage Sunset de Pierre Gonalons. Une idée par ailleurs facilement “bricolable” et transposable côté brocante.
J’ai également aimé les tasses incontestablement élégantes dessinées par Sylvain Dubuisson pour la marque Bernardaud (en photo à gauche sur le site).
Et puis il y a ce que je n’ai pas aimé du tout, avec une mention spéciale laideur que je décernerais volontiers au fauteuil S créé par Anne Haloche et Gilles Spriet. Ma poubelle elle-même d’ailleurs, dont je respecte beaucoup le goût, n’en voudrait pas. Mention spéciale laideur aussi, et surtout, au canapé Coco de Marcel Wanders, en “hommage” à Coco Chanel. De quoi vous faire prendre en grippe, jusqu’à la fin de vos jours, les canapés, Chanel, et les hommages. Lorsque j’ai montré la photo de ce canapé à ma poubelle, la malheureuse en a eu un haut-le-cœur.
Il était temps, visiblement, que je reprenne de la confiture et du fromage.
Lampes Sunset de Pierre Gonalons
Catissou dit
Peut-on connaitre l’adresse de cette table d’hôtes* dans le 19ème ?
Quand à l’association fromage de brebis et confitures de cerises noires (d’itxassou), je l’ai découverte au Pays Basque… Du pur bonheur…
Brigitte dit
…. essayez aussi avec de la confiture de figues ! un régal
et un autre truc connaissez vous : la poire fraîche avec du parmesan
ou du pecorino … mmm Amicalement. Brigitte
Catherine dit
J’aime beaucoup votre blogainsi que d’autres tout aussi “romantiques et branchés brocante”,mais il faut de tout dans la nature et j’adore un certain design qui m’apaise et me libère l’esprit…
Il n’y a pas que du snobisme dans le design et moi j’aime le côté épuré des meubles et objets(par exemple je déteste cette lampe.cage).
On peut aimer la confiture de cerises ET la confiture de coings!
Amitiés.
Bindou dit
Oh la la , il faut vite que je me trouve de la confiture de cerises. Une autre ne ferait-elle pas l’affaire? je viens de m’en faire un plein placard d’oranges
http:// dit
Eh oui, la bonne nourriture ne se contente pas de nourrir le corps, mais l’esprit et l’âme aussi !
Au fait, d’accord avec toi, le fauteuil est horrible et le canapé… pire encore !
Coccineline dit
J’aime le parler vrai, enfin on a le droit de ne pas aimer tout ce que l’on voit et toi tu nous le dis tout simplement et j’aime les gens nature c’est sans aucun doute pour cela que tu aimes les confitures aux cerises.
A bientôt
Coccineline
Lena dit
Oh les jolies Sunset! C’est davantage de la création que du design…
J’aime savoir que tu sais oublier ton apn lorsque tu dînes dehors…
http://lateliersous dit
Très belle idée que ces lampes, mais effectivement à transposer. Quelqu’un de bien intentionné (mais totalement à côté de la plaque) m’ avait abonnée à ce magazine, je n’y ai jamais rien trouvé!
hum…je verrais bien de la gelée de groseille aussi…
Constance dit
je partage absolument ta définition du design trop souvent caricaturale et élitiste. En ce qui me concerne, je ne l’apprécie que lorsqu’il met en avant la créativité et le savoir-faire des artisans. Quant à la confiture de cerises avec le fromage, excellent! Je te suggère l’association fromage-café (tartine de camembert par exemple), ça donne un superbe goût de noisette.
Alexandra dit
J ‘ai découvert le fromage de brebis accompagné de confiture de cerises il y a bien longtemps …en Ardèche dans un village si haut perdu qu’hélas…Il n’y avait pas de marchand de journaux et je n ‘ai donc pas pu acheter IDEAT !
Je le regrette vivement maintenant que je vois à côté de quoi je suis passée !
Fée des Brumes dit
Dans mon département très décoiffé ces temps-ci, on déguste de la pâte de coing avec les fromages de brebis … L’inconvénient, c’est que cela ne donne aucune envie de se jeter sur la presse design … Alors merci de nous faire découvrir ces jolis objets !
Audrey dit
Ah oui… le design me laisse… perplexe! Mais comme toi je ne dis pas non à une adaptation “brocante” de cette lampe cage!
Pour le mélange confiture/fromage je te conseille aussi de tenter l’association chèvre frais et confiture de groseille : pas mal du tout!
bibi-bazarette dit
J’aime le design -mais pas tout- et de plus en plus même si c’est à l’opposé de moi, Ideat, le brebis et la conf° de cerises oui afficionada je suis; c’est l’imitation du “vieux”, du “retro”, le côté je mets du champêtre partout parce que ça fait provençal -ma région- me comble par son mauvais goût, bref je déteste le néo-provençal.
Annica dit
Hello i really love the atmosphere in your blog sooo very beautiful!!!
Annica.
naline dit
Ah, vous aussi… le brebis et le confiture de cerises ! Je vois que la tribu de ces oiseaux rares aux goûts qui peuvent sembler particuliers n’est pas si limitée que cela !
ovar dit
marmelade de coings,c’est bien aussi!
Amandine dit
jolies ces lampes cages! Mais cher…comme tout objet un peu “design”, j’en avais fais une un peu dans le style avec une cage a oiseau achetée en brocante et une guirlande électrique “fleur”!
JOHAUR dit
tout à fait d’accord avec ta définition du design, beaucoup de superlatifs, pour pas grand chose parfois, j’aime bien les lampes cages, mais point besoin d’être un grand designer, pour avoir une idée pareille.
Bonne fin de journée
Rêve d'argile dit
Tout à fait OK avec toi.
Mo
cielo moon dit
“abolissant un certain rapport à soi, celui de son histoire”… Non pas forcément, mais le design raconte aussi une autre histoire, celle d’une fonction et la manière dont elle s’incarne dans un objet.
Pour moi c’est un prisme de plus pour observer, décoder, apprécier les objets qui nous entourent.