Mon caméléon, de Francis de Miomandre, est un livre absolument merveilleux. Il a été réédité en 2017 aux éditions de l’Arbre vengeur ce qui m’a certes facilité son accès mais je l’aurais lu de toute façon. J’ai bien l’intention de débusquer le plus grand nombre possible des publications de cet auteur injustement oublié.
Comme dans Écrit sur de l’eau il est ici question d’amour, non plus celui romancé d’un jeune homme inexpérimenté pour une femme, mais celui tout à fait véridique cette fois de l’auteur lui-même (et de sa femme) pour un caméléon. Nous sommes en 1926, alors que Francis de Miomandre passe des vacances à Aix-en-Provence il tombe sur une vieille cage à serins suspendue à la fenêtre d’un rez-de-chaussée contenant un caméléon. C’est la révélation, le coup de foudre ! Il revient chaque jour admirer le caméléon et fait la connaissance de son propriétaire, marin de son état, qui a rapporté l’animal d’Égypte trois mois auparavant. N’ayant guère le temps de s’en occuper il cède le caméléon à Francis de Miomandre au comble de la joie. Vont s’ensuivre trois années d’une vie commune pendant lesquelles l’auteur et sa femme seront les adorateurs et les observateurs passionnés de leur curieux petit compagnon venu du fond des âges, soucieux de lui au plus haut point, sans cesse attentifs à son bien-être physique et moral. Séti, tel est son nom, démontrera d’étonnantes facultés tout comme une grande sensibilité. Il suivra ses nouveaux maîtres quasiment partout et cette cohabitation sera pour eux l’occasion de vivre, dans leur appartement parisien ou en villégiature, maintes petites péripéties tour à tour drolatiques et émouvantes. Francis de Miomandre et sa femme aimeront Séti d’une manière exceptionnelle. L’infinie tendresse qu’ils lui portent donne au récit une grande force poétique. C’est un hymne à la joie et à la beauté qui prend aussi valeur d’exemple en incitant à aimer l’Autre, aussi éloigné de nous soit-il en apparence, moins pour soi que pour lui.
Une fois le livre refermé j’ai regardé (la tentation était trop facile) des vidéos sur les caméléons. On en trouve beaucoup sur internet réalisées par des particuliers ou des éleveurs. “Miomandrisé”, je n’ai pas pu m’empêcher de trouver ces personnes assez insignifiantes et peu dignes de posséder des caméléons, s’en occupant mécaniquement sans être capable d’en percevoir la dimension merveilleuse, sans être capable le moins du monde de ce sentiment d’amour noble et élevé que Francis de Miomandre a éprouvé si naturellement et dont il a su faire une aventure magistralement belle et attachante. Ils élèvent des spécimens, point. N’est pas Francis de Miomandre qui veut !
J’ai volontairement défloré le moins possible l’histoire pour le cas où vous auriez l’envie, forcément heureuse, de lire Mon caméléon. J’espère alors qu’elle sera pour vous comme elle l’a été pour moi une grande source de joie.
Mon caméléon
Francis de Miomandre
Éditions de l’Arbre vengeur
2017
245 pages
Annfil dit
A ma prochaine visite dans ma librairie préféré ( rue de la Convention ) j’achète ce livre que tu décris si bien. Moi qui adore les récits d’animaux cela devrait me convenir.
Merci.
Philippe Joubert Lussac dit
Alors j’espère qu’elle l’aura.
Barbaravousenditplus.wordpress.com dit
Magnifique chronique qui moi aussi me donne envie de courir l’acheter. On m’avait déjà parlé de ce livre il y a quelques années sur le Salon du Livre à Paris. Maintenant c’est décidé, il me le faut. A quand la chronique pour nous conseiller sur l’achat d’un caméléon? J’adore ce petit animal trop drôle, mais bon suis pas sûre qu’il s’entendrait bien avec mon chat… :)
Philippe Joubert Lussac dit
Le chat est en effet l’un des prédateurs du caméléon…
Triskell dit
Je croule littéralement sous les livres en ce moment, ceux que j’ai achetés, ceux qu’on m’a offerts, prêtés, mais je note dans mon petit carnet magique les bonnes recos glanées sur les blogs. il m’est arrivé hélas d’être déçue, mais si le conseil vient de toi, franchement, ca m’étonnerait que ce soit le cas. Et j’adore la couverture ;-)) Quelle bouille, ce Séti !
Philippe Joubert Lussac dit
Le mien est vite arrivé sur le dessus de la pile. C’est ça avec les caméléons, ça grimpe.
Polly dit
Ah ben tiens, c’est exactement mon histoire !! :
Un jour (il y a looooongtemps) , je tombe sur le premier article de Gris-Bleu; je le parcours, puis je le lis, puis je le dévore.
Je m’étonne, je fronce un sourcil, hausse l’autre, ébauche un sourire ravi, je caracole de phrase en phrase, bondis d’un paragraphe à l’autre, si bien que j’arrive à la fin en si peu de temps que j’en réclame encore !!!
Las ! Je vous l’ai dit dès le début : c’était son premier article !!
Impossible donc d’en reprendre une lichette et encore moins le bol tout entier.
Alors je me suis dit “Tiens, je vais aller lire d’autres blogs”.
Pffffffff….
Je n’ai pas pu m’empêcher de trouver les articles de ces personnes assez insignifiants et peu dignes de figurer sur un blog, Ces personnes s’en occupant mécaniquement sans être capable d’en percevoir la dimension merveilleuse, sans être capable le moins du monde de ce sentiment d’amour noble et élevé que Gris-Bleu a éprouvé si naturellement et qu’il a su rendre d’une écriture magistralement belle et attachante. Ils tiennent des blogs, point.
N’est pas Gris-Bleu qui veut !
♥
Philippe Joubert Lussac dit
Polly, je vais me noyer, on ne m’a pas appris à nager dans autant de compliments…
GAYOT dit
Fichtre ! 245 pages pour un caméléon… Que peut-il donc avoir de si extraordinaire ? Une certitude, votre présentation de l’ouvrage est tout à fait merveilleuse. Quel talent ! Merci.
Philippe Joubert Lussac dit
Il a de si extraordinaire le talent et la sensibilité de Francis de Miomandre.
Vinciane dit
Bravo Polly pour votre commentaire sublime et tellement vrai.
Philippe, il fera partie de ma prochaine lecture. Merci pour ton doux récit.
A bientôt
Philippe Joubert Lussac dit
Tu me diras, mais il te plaira je n’ai pas trop de doute !
Monique dit
Vu le récit que tu en fais cela donne vraiment envie de le lire.
Merci
Philippe Joubert Lussac dit
C’est que cela faisait longtemps que je n’avais pas été aussi enthousiasmé par une lecture.
Michèle 17 dit
Comment ne pas succomber à la tentation de lire ce livre après ce merveilleux récit . Merci et bonne soirée
Philippe Joubert Lussac dit
Je me le demande aussi ! ;-)
folfaerie dit
Oh, merci de nous faire connaître ce qui semble être une pépite, je vous fais confiance. Et moi qui adore les histoires d’animaux, sans plus hésiter, j’irai le commander la semaine prochaine. La lecture de votre billet fut la petite parenthèse enchantée de ce début de journée !
Philippe Joubert Lussac dit
Vous aimerez j’en suis certain.
joubert michel dit
Ils sont fous les Gaulois….
Sara dit
Quelle joie, quelle merveille de se trouver un tel livre qui peut t’attrapper tellement, j’y rêve, vraiment. Alors, mes félicitations de pouvoir jouir aussi d’un livre, qui, d’ailleurs, semblairait que m’attrapparait aussi à moi…
Philippe Joubert Lussac dit
Oui Sara, je suis sûr qu’il te plairait aussi.
Antonella dit
Bonjour,
En surfant à la cueillette de quelques informations sur de Miomandre, j’ai rencontré ce blog pour lequel je vous remercie.
J’ai à peine terminé la lecture de Mon caméléon et j’en suis sous le charme intense.
Je n’ai pu trouver que « Caprices » comme autre livre de cet écrivain, les autres ne semblent plus être édités. Un jour peut-être…
A mes yeux, Mon caméléon est plus qu’un roman, il est un univers, une manière d’être, un imaginaire entre soi et le monde.
N’est-ce pas que les bons livres sont d’excellents compagnons ?
Philippe Joubert Lussac dit
Les livres sont les meilleurs compagnons qui soient. Trouver des livres de Francis de Miomandre n’est pas très facile en effet. Espérons que Mon Caméléon aura eu assez de succès pour donner l’envie à des éditeurs de lui redonner une place qu’il mérite. Si vous cherchez des informations sur cet auteur je ne peux que vous conseiller la biographie fouillée que lui a consacré un jeune chercheur, Rémi Rousselot, aux éditions de la Différence.
Antonella dit
Je vous remercie pour le conseil au sujet de la biographie de Rémi Rousselot. Bonne journée