Alors que je n’étais pas sorti depuis lundi j’ai pu constater cet après-midi en allant au supermarché du coin que des gens étaient effectivement encore dehors qui n’avaient visiblement rien à y faire. J’ai remercié la caissière d’être là, elle a souri derrière son masque. Les rouges à lèvres ne sont plus à la fête.
Le soir, le rituel s’est installé des applaudissements à la fenêtre. Je pense aux soignants et aux autres, tous ceux qui sont dehors à travailler pour que la vie continue tant bien que mal. C’est un moment émouvant, l’expression d’une gratitude et en même temps un lien qui se tisse. Nous n’en sommes qu’au quatrième jour d’une période vraisemblablement partie pour durer des semaines ou des mois. Il nous faut encaisser l’arrêt brutal de notre vie d’avant, organiser l’immobilité. Ce n’est pas rien. À la télévision les publicités déconnectées de la réalité continuent de nous parler d’un monde paraissant curieusement lointain. Le papier toilette et le paquet de pâtes quant à eux n’ont plus besoin de pub, ils connaissent une promotion sociale inespérée. Sur les réseaux sociaux l’humour fédère ses troupes avec parfois beaucoup d’esprit et de talent. Il faut bien ça pour traverser nos inquiétudes. Nous étions si bien installés dans notre sentiment de toute puissance, presque d’invulnérabilité.
Autre ambiance sur les médias d’information en continu qui martèlent des nombres de décès et de malades toujours plus importants. Les Américains, eux, sont sidérés : Disneyland est fermé. À tant avoir fantasmé les catastrophes à travers leurs films ils vont enfin pouvoir en goûter une en vrai. Je ne peux m’empêcher cette pensée un peu méchante.
L’information en continu est au fond comme le virus, il faut savoir la tenir à distance pour ne pas se laisser envahir par une affreuse angoisse. Nous allons avoir du temps pour réfléchir, mais j’espère que les premiers à réfléchir seront ceux qui ont progressivement affaibli notre système public de santé depuis au moins trois décennies à force de réductions budgétaires et de lits en moins dans les hôpitaux.
Nous vivons collectivement une expérience de la vulnérabilité et de l’instabilité très grande et, comme tout le monde ou presque j’imagine, une sourde inquiétude me tenaille. Où cela va-t-il nous mener ? Quand la pandémie s’arrêtera-t-elle ? Trouverons-nous un vaccin ? Et au bout du compte : que ferons-nous de tout cela ?
Pour l’heure je digère. Je ne me sens pas mal armé à certains égards pour affronter le confinement, tant qu’aucune pénurie alimentaire ne surviendra du moins : plus de 50 livres d’avance m’attendent , j’ai du matériel en suffisance pour dessiner et peindre, différents projets personnels sur lesquels m’appuyer pour continuer de me projeter dans l’avenir, et j’ai mon appareil photo et mes logiciels graphiques. Mais si j’ai l’habitude de travailler seul je trouve mon équilibre en temps normal grâce à une sociabilité intense qui va finir par me manquer beaucoup je crois. Les succédanés virtuels à la “vraie vie” sont heureusement là pour maintenir le contact, donner et prendre des nouvelles. Je sens que je vais aussi profiter de ce temps particulier pour renouer des liens distendus par le temps, la vie, l’éloignement géographique.
Je vais aussi essayer d’être plus présent sur mon blog avec des billets peut-être plus courts mais plus fréquents. Continuer d’évoquer ce temps à part et ce qu’il m’inspire, resserrer un peu le lien avec vous aussi.
En attendant bien sûr restez chez vous, prenez soin de vous. Et puis…à votre fenêtre ou dans votre jardin, respirez ce bon air pur que la raréfaction des voitures nous a enfin rendu (sur Paris, le changement est énorme), écoutez aussi ce que les oiseaux nous disent alors que tout reverdit déjà.
Amalia Corsini dit
Merci Philippe
Vous avez tout dit magnifiquement, comme à votre habitude.
Ce sera bon de vous retrouver plus fréquemment. À très vite
Philippe Joubert Lussac dit
Mais je ne garantis pas des textes très joyeux…
Nadine GUERET dit
Merci beaucoup pour ce très beau message et bon courage à vous aussi Nadine
Philippe Joubert Lussac dit
Merci Nadine !
Marie_ Sylvie Guyard dit
Merci…. c.est intelligent ce que vous exprimez.
Philippe Joubert Lussac dit
Merci ! ;-)
khatouna dit
merci pour ce partage à la fin de la journée… je vis en Suisse dans un village si petit qu’il est difficile d’y croiser du monde….
Une journée qui se termine avec son lot de mauvaises nouvelles et de bilans terrifiants…. mais de petits bonheurs aussi…
Un pain tout chaud fait pour nous avec dessus un cœur et ces petits “on vous aime”…..
Un petit message d’amis arrivé enfin chez eu après un voyage sans fin (et sans nouvelles) depuis le fin fond du Maroc et les frontières qui se referment partout derrière eux….
La surprise de découvrir que notre voisin, si discret, est un des responsable du grand hôpital universitaire…. je l’ignorais…
Et si un de ces prochains matins il me prenait l’envie de me plaindre, alors il sera temps pour moi de relire le journal d’Anne Franck……
Philippe Joubert Lussac dit
On vous sent sereine et prête à savourer les petits plaisirs de la vie à portée, c’est parfait pour le confinement ! ;-)
khatouna dit
merci, oui je suis en paix, tellement reconnaissante pour tous ces petits bonheurs qui illuminent chaque journée…. votre blog et ce que vous partagez dans vos pages en font partie et même si je ne laisse pas de trace, je viens souviens m’y promener
Christelle dit
Merci pour ce message où l’on devine l’angoisse bien légitime mais heureusement il y a aussi un brin d’espoir.
Philippe Joubert Lussac dit
Un brin d’espoir, très brindille, pour l’heure encore.
Marie July dit
Ah cher Philippe, qu’il est bon de vous lire, de vous retrouver enfin !
Je me mettrais presque à remercier ce moment qui balance entre étonnement et absurdité mais qui permet de vous rapprocher.
Oui, venez nous ravir en même temps qu’il vous en fera du bien.
Vous avez tout si bien exprimé que je n’ajouterai rien d’autre que mes remerciements profonds envers celles et ceux qui se donnent sans compter pour que nous vivions presque naturellement.
Et merci à vous cher doux Poète 🙏
Philippe Joubert Lussac dit
Merci Marie, votre enthousiasme me fait bien sûr très plaisir et vous avez bien raison de penser à toutes ces personnes.
Sophie dit
Une pensée de Nimes où je ne suis pas sortie depuis mardi .
J’ai quelques provisions et je respecterai scrupuleusement les directives d’abord parce que je suis une personne à risque et ensuite parce que je ne suis pas d’une nature égoïste et que je crois avoir un cerveau, moi !
J’espère que les gens apprendront à être raisonnable mais il y a encore un long chemin .
Dans mon immeuble les gens sont jeunes et apparemment ils respectent bien l’idée du « je ne me sens pas concerné , je suis jeune « ( et con mais ça apparemment il ne le sait pas ) entendu dans la bouche d’un père de famille avec son petit garçon dans les bras !
Je te souhaite d’aller bien
A très vite
Amitié
Philippe Joubert Lussac dit
Merci Sophie, sois bien prudente, pour le reste je suis sûr que tu ne vas pas manquer d’occupation dans ton joli chez toi.
Fiorenza dit
Un fil d’argent nous relie en ce moment …
Lorsque j’écris NOUS, je pense à toutes ces personnes qui, aujourd’hui,
n’ont pas oublié que le printemps était arrivé !
Merci à vous, Philippe, votre élégance allège la morosité !
Philippe Joubert Lussac dit
J’avoue que je n’avais pas fait attention à la date. Mais le printemps est déjà éclatant dehors, tout pousse à grande vitesse et ce moment est à chaque fois un émerveillement.
jardin du Tomple dit
Merci .
Philippe Joubert Lussac dit
Je suis ravi de te revoir par ici ! ;-) J’espère que tu vas bien.
Nathanaëlle dit
Merci pour ce petit mot. Solidarité et patience… Prenez soin de vous.
Philippe Joubert Lussac dit
Merci Nathanaëlle.
Vinciane dit
Bonjour Philippe,
Merci pour tes mots bien choisis, je ne serai que plus heureuse si tu reviens plus souvent. J’ai pensé à toi le mois dernier lorsqu’un de mes élèves a présenté son texte pour le concours du tournoi d’éloquence. “La poésie, souvenir d’un temps révolu ?” Ils étaient 122 jeunes en dernière année du secondaire à présenter leur texte. La poésie l’a emporté !
Chez nous, il nous est conseillé de sortir prendre l’air, aller courir, marcher, seul(e) ou avec un ami ou un membre de la famille. Le printemps est là même si certaines nuits seront froides, le soleil est de retour depuis samedi dernier. J’ai hâte de voir la nature reprendre ses droits.
Bonne réalisation dans tout ce que tu entreprendras. Au plaisir de te lire.
Amitiés
Vinciane
Philippe Joubert Lussac dit
Bravo à ton élève qui a su défendre la poésie, et bravo aussi à sa professeure qui doit faire du bon boulot ! ;-)
marie agapanthe dit
Merci pour ce texte si merveilleusement écrit, si juste et qui exprime exactement ce que je ressens en ces moments troubles. Moi aussi, je ne suis pas en pénurie : une pile de livres m’attend et je vais sans doute ressortir pinceaux et boite d’aquarelle !
Amitiés
Marie *
Philippe Joubert Lussac dit
Pinceaux et aquarelles trépignent déjà j’en suis sûr ! ;-)
nathalie dit
Merci beaucoup pour ce billet! Vous lire est si plaisant, c’est chaque fois un moment d’élégance!
Philippe Joubert Lussac dit
Merci Nathalie !
defilenpinceau dit
C’est exactement tout ce que j’avais envie de dire mais je ne sais pas écrire…
Moi aussi je vais continuer mon blog, comme si de rien n’était, sans parler de choses tristes, enfin je vais essayer tant que je pourrai. Ce petit lien avec les autres m’a toujours été important, il l’est encore plus et puisque nous n’avons que ça pour échanger on s’y accroche en espérant que le système tienne bon.
Je me permets de vous embrasser, virtuellement nous ne prenons aucun risque.
Belle journée à vous et à bientôt sur le net
Michèle
Philippe Joubert Lussac dit
“je ne sais pas écrire”, c’est faux, c’est juste une petite voix intérieur malfaisante qui vous susurre ça ! Il ne faut pas l’écouter, il faut même lui dire de se taire.
Je prends cette bise prudemment virtuelle.
Marie-Anne dit
j’adhère à toutes tes reflexions !
Philippe Joubert Lussac dit
Elles ne sont pas trop collantes j’espère ? ;-)
Thai dit
Vous avez tout dit avec retenue et sobriété.
Texte admirable qui pourrait figurer dans un livre avec vos dessins si poétiques.
Votre adorable chat au milieu des plantes vertes me fait un signe d’ amitié pendant la journée.
Vous avez ce privilège de créer de la beauté même au milieu du chaos.
Avec toute ma gratitude.
Odile
Philippe Joubert Lussac dit
Merci beaucoup Odile et je me réjouis que le chat soit si amical, même si je n’en suis pas très surpris. :-)
Florence dit
Grand merci Philippe pour ce beau message qui transcrit si bien ce que je ressens….Je suis d’un naturel optimiste.Aussi suis je persuadée que cette pandémie permettra à l’homme de se poser les vrais questions.Pourquoi courir après toujours plus de biens alors que la planète brûle ?Ralentir son rythme ,se recentrer sur sa famille,ses amis (et sur soi !)sera certainement profitable ….Mais à quel prix malheureusement ! De mon côté ,je reste chez moi avec mon mari….j’ai la chance d’être dans une immense maison avec un grand jardin… et d’avoir de multiples centres d’intérêts .De quoi m’occuper durant quelques semaines !Je me dis que je suis vraiment privilégiée …..Mes amicales pensées t’accompagnent Philippe.Bises d’aurillac.Florence
Philippe Joubert Lussac dit
Florence, tu as de la chance d’avoir un espace qui atténue ton impression d’être cloitrée et d’avoir des centres d’intérêt variés. Les personnes qui n’aiment pas lire ou faire des choses de leurs mains risquent de trouver le temps long. Ceci dit, l’ennui est aussi quelque chose que nous devrions apprendre à apprécier.
joubert michel dit
Toute l’angoisse et la tristesse du monde se reflète dans ton billet Philippe, mais aussi l’espoir de jours meilleurs ou renaîtrait la solidarité et l’empathie.
Rien n’est jamais perdu et notre jeunesse aura comme nos parents et grands-parents connu une catastrophe mondiale qui va les unir pour repartir.
Philippe Joubert Lussac dit
Mon naturel optimiste a tendance à prendre le dessus. Du moins légèrement ! ;-)
HERMINE dit
Merci Philippe, votre délicatesse est toujours aussi présente, quelle lucidité élégante.
je me retrouve dans tout ce que vous avez écrit. Je profite des tous ces petits riens qui font le bonheur de tous les jours, désormais!!! mais espère la fin de ce confinement forcé. C’est très troublant et heureusement ce n’est pas “la guerre” ce mot si présent et répété volontairement par notre Président!!!!
A bientôt de vous lire très vite. Hermine
Philippe Joubert Lussac dit
Edgard Morin interrogé aujourd’hui a souligné très justement que dans le cas d’une guerre on était confiné par l’ennemi tandis que dans la situation actuelle nous nous confinons pour vaincre l’ennemi. Le terme de combat aurait sans doute été mieux choisi, mais moins marquant.
BY dit
Merci pour ce très beau texte : tu as tout dit .
On a vécu ça de loin quand elle a commencé en Chine , on a été perplexe par cette ville morte avec autant d’habitants mais …pas surpris avec les chinois . Et puis grand saut avec l’Italie …dans ce petit village !!!!Là j’ai commencé à penser que ce virus n’était pas comme les autres . Maintenant c’est notre tour (mais pas seuls!!!) et la légèreté des Français m’a donné la nausée .
Mes pensées quotidiennes vont aux familles atteintes sans pouvoir accompagner leurs proches , aux soignants qui ne comptent pas leurs heures pour sauver des vies et à tous ceux qui s’exposent pour nous.
Je rêve au milieu de cette tragédie à un monde qui change après , que nous allions à l’essentiel .
Essaie de prendre un peu de plaisir dans tes activités (oui!!!! pour des billets plus fréquents ) sans oublier ceux qui sont au combat .
Claude Poliani dit
Un très grand merci pour ces mots qui abordent vraiment toutes les questions de fond, à commencer par l’impact des politiques menées qui ont réduit les moyens en terme de santé publique. Merci bien sûr pour votre talent d’écrivain, merci pour votre sensibilité, artistique et humaine, merci pour vos talents créatifs et merci encore de nous promettre d’autres texte qui nous permettrons de vous retrouver plus souvent et d’échapper un peu aux affres d’un confinement dont on ne sait quand il se terminera…. Prenez bien soin de vous et au plaisir de vous lire. Claude
Philippe Joubert Lussac dit
Merci pour tous ces compliments et cette invitation à poursuivre.
Philippe Joubert Lussac dit
Alors nous partageons le même rêve.
alouette dit
Malheureusement , le pessimisme me gagne :d’un côté il y a plein de gens qui sont sur le pont pour affronter l’ennemi sournois qui nous fait la guerre , mais de l’autre il y a tous les imbéciles égoïstes qui se comportent comme des criminels (oui ,j’ose le mot )irresponsables Malheureusement ,par la suite ,avec ce genre de personnes on retombera dans les mêmes systèmes ,la course à l’argent ,le gaspillage écologique ,etc.
Heureusement ,et pour nous consoler ,il y aura toujours des poêtes et des gens d’esprit comme toi pour écrire avec sensibilité…..Continue ,cela fait du bien .Merci.
Philippe Joubert Lussac dit
Difficile d’être prophète, soit tout repartira comme avant, en pire peut-être dans une soif de vivre sans frein, soit, et ce serait mon vœu, nous repenserons notre modèle économique, notre relation à la nature, nous irons vers plus de sobriété….
De Bermond Chantal dit
Merci Philippe
Avant ….. on pouvait penser que le bonheur ( ou une forme de bonheur ) était notre vie de consommation , de déplacement pour les week rend…et autres envies auxquelles on ne pouvait pas résister !….
Aujourd’hui notre bonheur est de pouvoir rester chez nous en bonne santé de ne pas manquer de l essentiel …d apprécier ce que nous avons ! d écouter le silence et d entendre les oiseaux chanter !
Prennons notre temps pour realiser tout ce que nous ne pouvons pas faire en temps normal avec toutes nos pensées et notre admiration pour les soignants .
Et surtout prennez soin de vous et de vos proches ! Et pour cela :
RESTEZ CHEZ VOUS
Chantal
Philippe Joubert Lussac dit
Je ne sais pas si l’on peut parler de bonheur à rester chez soi, à part pour les fan de déco ! ;-) L’essentiel tourne bien sûr autour de notre sentiment de sécurité, de notre santé, de notre alimentation mais notre isolement imposé deviendra très pesant le temps passant. Reste qu’effectivement, ceux qui plaçaient leur idée du bonheur dans la sur-consommation, la voiture, le jetable, les voyages etc., en ont actuellement pour leur grade si je puis dire. Je suis de ceux qui n’espèrent qu’une chose, c’est que cette manière d’être au monde soit durablement dégradée par la crise que nous vivons.
Polly dit
Ah que ça fait du bien de lire ça !!
Élégant et poète et optimiste notre Philippe, oui. Toujours.
Mais aujourd’hui il a quand même décidé de sortir sa boite à baffes. Et Dieu sait qu’il y a de quoi faire, à commencer par ceux qui savaient et ont laissé faire en mettant encore et toujours l’intérêt des gouvernants ET de la sacro-sainte Economie avant l’intérêt (et la sauvegarde) de la population.
Et on continue par ceux qui ont démoli notre système de santé (oui, j’assume : démoli !). Et ils s’y sont mis à plusieurs depuis le temps !! (mais qui montrait les syndicats du doigts en se foutant d’eux et en les caricaturant, comme ceux de la RATP “qui nous prennent en otaaaaaages” !! On n’y est pas, peut-être, maintenant “en otages” ?? Et je n’entends personne prononcer l’expression…)
Et on termine en beauté en parlant non plus des salauds mais des cons (pardon Philippe, pardon tout le monde, ça fait tache sur le beau blog paisible et harmonieux de Philippe mais il y a des jours où il faut appeler les choses et les gens par leurs noms !)
Ca serait bien qu’on arrête de pointer du doigt “les quartiers” !
Ils ne sont sûrement pas exempts de critiques mais en bas de chez moi, pas de d’jeuns depuis plusieurs jours, pas d’encapuchonné (alors que le bas de mon immeuble est un de leurs points de ralliement stratégiques). En revanche du bon père de famille qui va faire ses courses (tous les jours, parce que c’est indispensable de faire ses courses au quotidien) et qui se flanque de ses deux niards parce qu’il faut sortir les p’tits (qui du coup restent 20 mn à courir et brailler dans la rue, et à tomber les mains en avant dans les déjections de ceux que rien n’arrête) !!
Et quand ses p’tits auront chopé le virus il sera le premier à venir chougner au scandale et à l’assassin !
Idem pour une vieille conne qui est resté 35 mn (pas 5 mn, pas un quart d’heure : 35 mn !!!) à faire les cents pas sous mes fenêtres en téléphonant !!! J’ai cru que j’allais descendre lui mettre un pain !!!
C’est grâce à tous ces inciviques qu’on va se retrouver avec l’armée dans la rue et des mesures draconiennes de sortie alors qu’avec juste un peu de discipline (et surtout de bon sens) tout le monde pourrait faire “un peu”.
Mais non, comme toujours il va leur falloir l’autorité avec une matraque à la main !
Et ça, c’est pas du d’jeuns et c’est pas de la caillera.
Juste nos bons gros vieux cons !!!
(oui, je suis un poil énervée !)
D’aucun parlent d’inconscience.
Si ce n’était que de l’inconscience, je serais probablement moins énervée car l’inconscience peut s’éduquer.
Mais non, c’est pire : c’est du j’m’enfoutisme, du chacun pour moi, comme la gourde de la semaine dernière dans le métro, assise juste en face de moi et qui a braillé dans son téléphone pour raconter des choses impérissables et d’un vide abyssal à sa copine pendant 8 stations (8 stations !!!) Et quand enfin elle a raccroché et que j’ai pu reprendre ma lecture, ça n’a été que le temps de reprendre son souffle et de chercher dans son carnet d’adresses une autre première de la classe comme elle à qui recommencer à raconter sa vie ! Et quand n’en pouvant plus je lui ai demandé de parler moins fort ou d’attendre d’être chez elle pour appeler la terre entière, elle s’est mise à me dire qu’elle “en avait rien à foutre de moi et que j’avais qu’à me taire” !
Voilà, c’est ça, on y est : “chacun pour moi” !!!
Le tout à l’ego des minables.
Ceux qui reprendront exactement là où le monde s’est arrêté. Qui n’auront rien appris, rien retenu, rien compris et qui recommenceront à acheter des milliards de choses dont ils n’ont pas besoin, à attendre la fin du travail comme la seule bénédiction de leur vie, à écraser des hérissons sur les routes et à balancer leurs bouteilles plastique sur les plages.
Ouais, un poil énervée.
On va dire ça comme ça ;-)
Et pas très optimiste, excusez-moi.
Philippe Joubert Lussac dit
Chère Polly, cela fait le plus grand bien à mon “blog paisible” d’être un peu ébouriffé. ;-)
Je souscris à tous vos énervements, vos agacements, et à ce “tout à l’ego” qui me plait beaucoup. Certaines personnes sont des cocktails trop forts : trop de bêtise, trop d’égoïsme, trop d’impolitesse, c’est imbuvable.
Polly dit
Il n’empêche que c’est à votre poésie que je me ressource le mieux et à votre élégance que je (re)trouve ma sérénité.
Merci d’être là cher Philippe. Et même de souscrire à mes emportements ;-)
Prenez bien soin de vous, n’est-ce pas ?
Je vous embrasse ♥
Philippe Joubert Lussac dit
Je prends soin de moi Polly, je sors faire mon footing tout nu pour que le virus glisse sur moi sans pouvoir s’accrocher et je me couche le soir dans mon scaphandre pour qu’il ne puisse pas m’attaquer sournoisement dans le noir ! ;-)
Polly dit
DES PHOTOS ! DES PHOTOS ! DES PHOTOS ! DES PHOTOS !!!!!!!!!!
:) :) :)
Philippe Joubert Lussac dit
Je ne trouve plus mon appareil photo, c’est ballot ! ;-)
Lune dit
Votre texte juste, sensible, réaliste rencontre le ressenti universel de tout “honnête homme”.
Votre petit chat, posé dans une bibliothèque, apporte rêve et douceur en ces moments particuliers. Continuez votre travail artistique! L’art est un des meilleurs refuges en ces temps troublés.
D’une Belgique confinée, à l’écoute d’une France que nous aimons, j’ envoie encouragements et pensées positives à vous et à ceux qui passent sur ce blog.
Philippe Joubert Lussac dit
Merci Lune pour cet envoi de pensées. Elles ont été bien reçues ! ;-)
Bertille dit
Tout est dit ; pas mieux !
On a tous et toutes des exemples de gens, pourtant pas bêtes, qui jurent que “non, non, j’en ai pas peur du corona…”
Mais cesse donc, ami(e) de ne penser qu’à toi et de dire qu’il faut bien mourir un jour. Peux tu imaginer l’agonie d’une fin de vie à étouffer ? A bout de souffle, c’est pas du cinéma !!!
Tu ne sais pas que tu le transportes ce virus de m…. ? Sois juste, citoyen(ne) et RESTE CHEZ TOI.
Tes considérations, tout le monde s’en tape.
Tu ne connais pas de gens dans le monde médical ? Moi, si… Un fils, une belle fille (enceinte) une nièce, deux neveux sont infirmiers(ères) Je vais te faire lire leurs SMS (notre seul moyen de communication) :
“Maman, ici c’est l’horreur, on fait de la médecine de guerre dans des conditions effroyables… Je tousse un peu mais ça va…” (mon fils veut me rassurer, je cache ma peur, mes angoisses)
“On est tous réquisitionnés, les services de réa débordent… on doit choisir, très vite (faut pas réfléchir) qui doit vivre ou mourir, On intube les plus graves mais ils le sont tous. Je vis les heures les plus sombres de ma carrière. Je passe ma vie à l’hôpital. J’ai l’impression d’être dans un film d’horreur quand je dois mentir à une dame qui sent sa fin proche, en la rassurant – non, non vous n’êtes pas seule… on est là pour vous- Elle est partie… pas dupe… et seule, sans aucun membre de sa famille près d’elle à l’heure ultime. P….. c’est dur !”
Peter, mon neveu, est infirmer au SAMU d’un gros hôpital du 77 et malgré une expérience de cas graves, il n’en revient pas.
Alors, oui, je te le redis, à toi qui es venue de Paris en Sologne, vite fait (tiens, au fait, tu supportes mieux maintenant le cri du coq, les cloches de l’église, l’odeur du fumier ?) pour sortir les chiens de tes voisins âgés (ils faisaient comment avant hein ?) oui, toi qui as trouvé ce subterfuge fallacieux pour aller te promener et échapper ainsi au confinement, oui oui, oui,
RESTE CHEZ TOI, toi qui ne supporte pas l’autorité !!!
Me suis un peu agacée… je l’avoue ! Pardon…
Mais je ne fais pas partie de ces gens qui se sont rués dans les magasins pour faire égoïstement des provisions et je vais rester chez moi jusqu’à ce que j’aie vraiment besoin de nourriture. En attendant je vide le congélo (toujours bien garni) -ah…cette peur du manque- les placards, j’improvise et ce n’est pas plus mal.
Me sens citoyenne, simplement… et responsable. C’est juste ce qu’il faut faire en ce moment et se dire que c’est le seul moyen de stopper la propagation. On va s’en sortir et souhaitons le nous, pas trop mal. Enfin… j’espère…
Après ce coup de gueule, je te souhaite un bon dimanche Philippe. Merci pour tes mots doux, apaisants et ces jolies petites fleurs…
Bises.
Bertille
Philippe Joubert Lussac dit
Quel fossé entre ceux qui ne semblent pas concernés et ne se conduisent pas de façon responsable et toutes ces personnes engagées sur le terrain qui vivent une situation physiquement et moralement terrible, aux premières loges du risque de contamination. Tu as raison d’exprimer ta colère et tu n’as pas à t’en excuser. J’imagine ton inquiétude à savoir tes proches immergés dans cette affreuse situation. J’espère que tout ira bien pour leur santé au final, même s’ils resteront sûrement très marqués par tout ce qu’ils vivent actuellement…
Polly dit
Des bises à Bertille pour lui souhaiter bon courage et apaiser un peu (si possible) ses angoisses.
Et bien sûr des bises, des pensées, des bravo, des merci, à tous ses proches si engagés, si courageux, si exténués… A eux et à tous ceux qui se battent pour nous, pendant que nous (pauvres de nous !) nous menons ce combat si dur de rester chez nous… à ne rien foutre !
Je pense bien fort à vous Bertille ♥
Bertille dit
Merci Polly pour vos mots gentils. Je les transmets de suite à mes petits…
C’est vrai que ce n’est pas le confinement qui me coûte mais savoir qu’une partie de ma famille est sur le front, finit par atteindre mon moral. Je ne suis plus les infos à la télé, je me dis que quelqu’un me préviendra bien assez tôt s’il se passe quelque chose de plus grave (c’est possible, ça ???)
Hier un ami cardiologue en retraite m’a appelée et m’a forcée à sourire et à rire. J’avoue que cela a adouci ma soirée !
Prenez soin de vous aussi. Amicales pensées.
Bertille
Polly dit
Vous avez vu (et entendu) Bertille ? Aujourd’hui, c’est (enfin) à eux que l’on pense (“ils” connaissent le blog de Philippe forcément, et “ils” vous ont lue !! ;-)
Je sais qu’il y a eu du temps perdu et (déjà) des morts mais la machine se met en route pour (je l’espère) les protéger (mieux), les relayer (mieux) et les soutenir (mieux).
Il n’y a plus qu’à vous rendre le moral, le sourire et encore plus de force pour les aider à tenir… et on va y arriver, vous verrez !!
Courage Bertille… ♥
Bertille dit
Ce qui me manque surtout, c’est de ne plus les voir. Certes, ils sont tous loin et on ne se voit pas, non plus, tous les mois en temps normal. Alors, on “face time” à fond et je vois bien leurs traits tirés, la fatigue qui se lit sur leurs visages même quand ils me disent “mais, ça va… tu sais…” L’infirmier(re) est rassurant de nature !
Le confinement ne me coûte pas ; je suis heureuse dans ma maison et pour une fois que l’on ne m’oblige pas à “aller prendre l’air”. Les tulipes, jacinthes et iris (ils n’ont pas cessé de fleurir depuis l’année dernière…) colorent mon espace visuel et cela me suffit.
C’est une petite fille qui arrivera dans ma famille bordelaise mi-juillet et j’ai un super stock de laine. J’ai plein de livres “en retard”. J’ai ressorti ma boite d’aquarelliste, fait le point sur mes couleurs : j’ai de quoi largement m’occuper. Je ne suis pas la plus à plaindre.
J’ai préparé des photos pour un post depuis longtemps, je vais arrêter de procrastiner et m’y remettre. Mon blog est en stand-bye…
Prends bien soin de toi Philippe et à bientôt.
Bertille
Triskell dit
Quelle bonne idée ce journal ! Et comme il est dores et déjà mille fois plus intéressant que ceux que l’on peut croiser au hasard des lectures sur Internet. Ce sera, plus tard, pour les générations futures, un superbe témoignage de ce que furent ces journées de confinement.
L’idée serait que dans chaque pays touché (hem, tous, non ?) quelqu’un ait le même réflexe que toi, et qu’un inspiré recueille ces écrits pour les éditer.
Dominique, confinée mais confiante
Philippe Joubert Lussac dit
Il y a déjà des personnes travaillent à la collecte, j’ai connaissance d’au moins un projet de recueil de textes autobiographiques de cette période de confinement. Dans d’autres pays je ne doute pas qu’il y ait des projets identiques. Prends soin de toi Dominique, en espérant que tout va “bien”.
Par1beaumatin dit
Tout est si bien dit !!! Un moment que je me dis qu’on marche sur la tête dans ce pays …
Certains sortiront grandis de cette situation, d’autres encore plus bêtes qu’ils ne l’étaient avant ! En attendant que la ‘vague’ passe, on reste au chaud chez nous et on occupe l’esprit et les mains. Merci pour cette bulle d’oxygène qui fait un bien fou.
Prenez soin de vous !
Philippe Joubert Lussac dit
Merci, occupons-nous ou apprivoisons l’ennui, tant que tout ça se fait sagement chez soi.
Sara Bagés dit
Cest curieux comment, avec des kilomètres de distance, nous faisons le même, nous sentons le même…